Cours de biologie en ligne

NEURONES ET NERFS

 

Avec un peu plus de cent milliards de neurones (les cellules nerveuses), environ un million de milliards de synapses (les contacts que les neurones établissent entre eux) et des centaines de substances chimiques modulant l'activité de ce gigantesque réseau, le cerveau humain apparaît comme un ensemble d'une complexité inégalée au sein du monde vivant. Ainsi, des fonctions aussi élaborées que la mémoire, la conscience ou le langage résultent des propriétés physicochimiques des neurones, des circuits qu'ils établissent entre eux et des informations qu'ils véhiculent sous forme de signaux électriques.

Unité structurale et fonctionnelle du système nerveux, le neurone se présente en effet comme une cellule hautement différenciée, ce qui lui confère des propriétés particulières. Sur un plan structural, il se compose d'un corps cellulaire (le soma ou périkaryon) et de prolongements de deux types : les dendrites, souvent nombreuses, et l'axone, toujours unique, qui constituent les fibres nerveuses. Sur un plan fonctionnel, les caractéristiques de sa membrane lui permettent d'émettre et de conduire ce que l'on appelait autrefois l'influx nerveux (en référence à un mystérieux fluide de nature inconnue) et qu'on préfère aujourd'hui qualifier de potentiel d'action.

Cette particularité s'explique par le fait que le neurone est une structure excitable, c'est-à-dire qu'il est capable de réagir à une excitation donnée, à condition bien sûr que celle-ci soit suffisante et adaptée (on parle d'excitation efficace), et de produire une réponse spécifique qui cheminera dans ses prolongements.

Le tissu nerveux trouve son origine dans le feuillet externe de l'embryon qui, dès la troisième semaine, se différencie dorsalement en neurectoderme et s'invagine pour former le tube neural (à l'origine du névraxe) et les crêtes neurales (à l'origine de plusieurs structures annexes) au cours d'un processus appelé neurulation de l'embryon.

2018 sn embryo

Puis, au fur et à mesure que le tube et les crêtes neurales se développent pour donner naissance aux différentes structures nerveuses, les cellules épithéliales qui les constituent :

se multiplient (on passe chez l'Homme de quelques milliers à plusieurs centaines de milliards en quelques mois) ;

se différencient (en cellules nerveuses et en cellules gliales qui, comme on le verra, sont beaucoup plus nombreuses que les neurones) ;

migrent pour atteindre leur position définitive (en particulier grâce au soutien des cellules gliales) ;

établissent de nombreux contacts synaptiques entre elles ainsi qu'avec un certain nombre de cellules spécialisées permettant au système nerveux d'assurer ses fonctions sensorielles, motrices et glandulaires.

On est ainsi conduit à distinguer sur le plan anatomique un système nerveux central (avec l'encéphale et la moelle épinière) et un système nerveux périphérique (les nerfs et leurs ganglions).

 

 LE NEURONE

Comme toutes les cellules de l'organisme, le neurone possède tous les attributs d'une cellule animale classique. Le corps cellulaire présente, en revanche, quelques particularités liées à sa structure et à son fonctionnement.

 

Sa taille varie entre quelques micromètres et quelques dizaines de micromètres. Le minimum est de 5 µm pour les neurones en grain du cervelet, le maximum de 1 mm pour certains neurones ganglionnaires géants rencontrés chez l'Aplysie (un mollusque marin).

Sa membrane est classique mais elle est particulièrement riche en canaux ioniques, en pompes ioniques à activité ATPasique et en récepteurs qui peuvent être chimio-, électro- ou chimio/électrodépendants.

Son noyau est central, volumineux et renferme un gros nucléole. Il est bloqué en interphase. Cependant, et contrairement à une idée encore très répandue, s'il est vrai que le neurone ne peut plus se diviser en raison de sa haute différenciation, certaines régions du cerveau produisent quotidiennement des neurones à partir de cellules souches (neuroblastes).

Son cytosquelette est particulièrement abondant et structure tout l'espace intracellulaire. Il comprend des microtubules (tubuline), des microfilaments (actine) et des filaments intermédiaires ou neurofilaments constitués de polypeptides fibreux.

Son cytoplasme est riche en mitochondries et en ribosomes qui peuvent être libres ou associés à des saccules du réticulum endoplasmique formant des petits amas connus sous le nom de corps de Nissl (du nom de l'histologiste allemand Frantz Nissl qui les a décrits à la fin du dix-neuvième siècle grâce à une coloration spécifique).

 

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Mais comme le jeu préféré des neurones est de se transmettre de l'information, ils possèdent deux types de prolongements bien particuliers qui les distinguent des autres cellules:


Les dendrites, qui se divisent comme les branches d'un arbre, recueillent l'information et l'acheminent vers le corps de la cellule.

L'axone, généralement très long et unique. Cet axone conduit l'information du corps cellulaire vers d'autres neurones avec qui il fait des connexions appelées synapses. Les axones peuvent aussi stimuler directement d'autres types de cellules, comme celles des muscles ou des glandes.


Les neurones forment des réseaux à travers lesquels circule l'influx nerveux. Des dendrites jusqu'à l'extrémité parfois très éloignée de l'axone, c'est sous forme électrique que se propage cet influx à la surface de la membrane neuronale. Mais comme les neurones communiquent entre eux sans se toucher, ils utilisent des molécules spéciales appelées neurotransmetteurs pour faire passer l'influx nerveux d'un neurone à l'autre.

Cette transmission chimique de l'influx nerveux amène l'axone et les dendrites à développer des structures spécialisées pour la faciliter. Les dendrites possèdent ainsi des milliers " d'épines " qui bourgeonnent à leur surface.
C'est vis-à-vis ces épines que se situent les boutons terminaux des axones, sorte de renflements d'où sont excrétés les neurotransmetteurs. Mais ces structures qui constituent la synapse varient énormément de forme, tout comme la forme générale des neurones d'ailleurs…

Le neurone est une cellule hautement spécialisée qui a accentué des caractéristiques de base des cellules, comme le fait d'avoir un potentiel trans-membranaire, de pouvoir prolonger son cytoplasme, etc. Ses prolongements se sont à leur tour spécialisés, de sorte que les canaux ioniques et les récepteurs de la membrane des dendrites sont différents de celle de l'axone. De plus, chaque neurone est unique de par sa forme particulière, la position qu'il occupe dans le système nerveux et les connexions qu'il entretient avec d'autres neurones ou avec des cellules réceptrices (sensorielles) ou effectrices (musculaires ou glandulaires).

Selon les critères utilisés, on peut classer les neurones sous différentes catégories. Par exemple:

 

D'un point de vue fonctionnel, on distingue :

 
des neurones sensoriels qui captent les messages des récepteurs sensoriels et les communiquent au système nerveux central;

des neurones moteurs qui conduisent la commande motrice du cortex à la moelle épinière ou de la moelle aux muscles;

des interneurones (ou neurones intermédiaires) qui connectent entre eux différents neurones à l'intérieur du cerveau ou de la moelle épinière.

 

D'un point de vue morphologiques basée sur le nombre de prolongements qui partent du corps cellulaire, on peut aussi parler de :

- neurones pseudo-unipolaires qui ont un court prolongement qui se subdivise rapidement en deux, l'un faisant office de dendrite, l'autre d'axone;

- neurones multipolaires qui ont courts dendrites émanant du corps cellulaire et un long axone;

- neurones bipolaires qui ont deux prolongements principaux de longueur similaire.

 

LA MYÉLINISATION DES AXONES

 

Les neurones ont besoin de transmettre rapidement l'influx nerveux d'un bout à l'autre du corps humain. Pour accélérer la conduction nerveuse le long de leur axone, les neurones reçoivent souvent l'aide des cellules gliales environnantes.

Celles-ci s'enroulent autour de l'axone et forment une gaine isolante, un peu comme celle qui recouvrent les fils électriques. Cette gaine faite d'une substance grasse appelée myéline permet à l'influx nerveux de voyager plus vite dans l'axone. C'est comme si l'on enroulait du ruban adhésif autour d'un boyau d'arrosage rempli de trous pour augmenter la pression de l'eau. De la même façon, la gaine de myéline autour de l'axone permet d'accélérer la conduction nerveuse.  L'enroulement de cette gaine autour de l'axone se fait par sections, ce qui lui donne l'allure d'une suite de saucisses.

L'axone revêt souvent une gaine isolante qui permet à l'influx nerveux de circuler plus rapidement. Cette gaine est faite d'une substance grasse, la myéline, formée par l'enroulement de la membrane d'une cellule gliale. La myéline des neurones du cerveau provient des oligodendrocyte et celle des nerfs périphérique des cellules de Schwann.

 

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La gaine de myéline ne couvre cependant pas entièrement l'axone et en laisse de petites sections à découvert. Ces petits bouts d'axone exposés s'appellent les nœuds de Ranvier et sont espacés de 0,2 à 2 millimètres. La gaine de myéline accélère la conduction nerveuse parce que le potentiel d'action saute littéralement d'un nœud de Ranvier à l'autre. En effet, ce n'est qu'à cet endroit que les échanges ioniques générant le potentiel d'action peuvent avoir lieu. On parle alors de conduction saltatoire (qui " saute " d'un nœud à l'autre) par opposition à la propagation continue beaucoup plus lente qui survient dans les axones non myélinisés.

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Les avantages qu'offre la myéline en terme de préservation d'énergie et d'espace sont considérables…La myélinisation des axones accélère la conduction de l'influx nerveux d'une façon très originale, sans nécessiter de grands apports d'énergie supplémentaire et sans occuper beaucoup d'espace supplémentaire.  Les noeuds de Ranvier situé entre les régions myélinisées constituent une zone de faible résistance électrique au niveau de laquelle à peu près tous les canaux Na+ de l'axone sont concentrés. C'est donc à cet endroit que les potentiels d'action vont pouvoir se régénérer, après que les courants ioniques qui leur sont associés se soient propagés passivement le long de la gaine isolante entre deux nœuds. Cette propagation saltatoire permet au neurone de préserver son énergie puisque l'excitation active nécessaire à la propagation de l'influx est restreinte aux petites régions nodales.


Elle permet aussi une grande économie d'espace. En effet, la vitesse de conduction est proportionnelle au diamètre de la fibre pour une fibre myélinisée et à la racine carrée du diamètre pour une fibre non myélinisée. Cela veut dire qu'une fibre non myélinisée devrait avoir un calibre de plusieurs centimètres pour conduire l'influx à la même vitesse (100 m/s) qu'une fibre myélinisée de 20 micromètres de diamètre.

 

LES CELLULES GLIALES

Différents types de cellules gliales assurent, chacune à leur façon, le bon fonctionnement des neurones du système nerveux central.

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De forme étoilée, les astrocytes assurent un support mécanique aux neurones. Ils les approvisionnent en nutriments et assurent l'équilibre du milieu extracellulaire. Ils digèrent et éliminent aussi les débris de toutes sortes.
La microglie constitue la première ligne de défense contre les envahisseurs étrangers. Ce sont les macrophages du cerveau.

Les oligodendrocytes constituent la gaine de myéline qui entourent les axones de nombreux neurones. Le motif très particulier de cet enroulement accélère la conduction nerveuse

Des noms différents sont donnés aux cellules gliales qui assument ces fonctions dans le système nerveux périphérique. On parle alors de cellules satellites pour le support mécanique des neurones et de cellules de Schwann pour la fabrication de la myéline. Mais de toutes les cellules gliales, l'astrocyte est sans doute celui qui a les fonctions les plus complexes…

Les astrocytes, comme la plupart des cellules gliales, ont longtemps été considérés essentiellement pour leur rôle de support et d'entretient du tissu nerveux. Mais de plus en plus d'évidences plaident en faveur d'une implication beaucoup plus importante des astrocytes dans la communication nerveuse.

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On connaît depuis longtemps leur rôle de pourvoyeur du glucose nécessaires à l'activité nerveuse. Grâce à leurs ''pieds'' apposés contre la paroi des capillaires sanguins cérébraux, le glucose peut pénétrer dans les astrocytes où il est partiellement métabolisé et retransmis aux neurones. Il semble même qu'une activité synaptique plus intense favorise un apport plus élevé de glucose en activant le travail des astrocytes. On sait aussi que les astrocytes sont couplés les uns aux autres par des " gap-jonctions " à travers lesquels peut circuler divers métabolites. C'est par ces jonctions que les astrocytes évacuent vers les capillaires le potassium extracellulaire excédentaire généré par une intense activité neuronale.