Cours de biologie en ligne

LES PESTICIDES

  1. Introduction

 

  1. a) Historique: 

   Les pesticides sont utili­sés depuis fort longtemps. Il s'agissait jadis d'insecticides à base d'arsenic ou de bouillies à base de plantes tel que le py­rèthre. Les quantités de subs­tances utilisées ainsi que leur diversité ont fortement augmenté depuis la seconde moitié du XXème siècle. Le nombre de matières actives est passé d'une trentaine en 1950 à 428 en 1989.

  1. b) Production et consommation:

    En Belgique, les produits phytopharmaceutiques (qui "soignent" les plantes) représentent un chiffre d'affaires estimé à 5,5 milliards de francs et 9.800 tonnes de matières actives.

     La consommation globale de pesticides a augmenté de 74% en 20 ans (62-82) et ce, alors que les surfaces cultivées ont diminué d'environ 12% (1962-79).

  1. Différents pesticides et leurs types d'action

     Les pesticides sont des substances et préparations desti­nées à assurer la destruction, ou à prévenir l'action, des ani­maux, végétaux, micro-organismes et virus dits nuisibles.

     Ils sont surtout utilisés en agriculture. Mais il y a aussi des pesticides à usage non agricole: ils sont utilisés pour prévenir la décomposition des aliments, combattre les ani­maux, végétaux ou micro-organismes dans les habitations, bâti­ments, piscines, égouts.; combattre dans le sol et dans l'eau les organismes qui peuvent provoquer des maladies chez l'homme ou les animaux. Ainsi par exemple, les produits de traitement du bois et les peintures contiennent aussi des pesticides.

     Etant destinés à tuer des organismes vivants, tous les pesticides, quels qu'ils soient, même les moins nocifs, présen­tent une toxicité plus ou moins grande pour les différents éco­systèmes et l'être humain. Du ver de terre au faucon, du campa­gnol au renard, ce sont tous les maillons de la chaîne trophi­que (chaîne alimentaire) qui sont contaminés, et cela, sans distinction d'espèces.

     Tous ces produits ont la propriété d'être toxiques par contact, par ingestion et/ou par inhalation.

  1.  a) les herbicides:

      Ce sont des substances chimiques dont les propriétés agissent sur les plantes se trouvant en concurrence avec le type de culture choisi (agriculture, jardinage...). Cette action se fait de manière sélective ou totale.

      Les herbicides représentent 50 à 60% de la consommation de produits phytopharmaceutiques, étant bien entendu que ces quan­tités varient en fonction de l'apparition des parasites.

    b)les insecticides:

    Les insecticides dits systémiques ont la faculté de tran­siter dans la sève des plantes (par les feuilles ou les raci­nes) dont se nourrissent les insectes tels que pucerons, coche­nilles, acariens. Ces insecticides systémiques sont générale­ment de la famille des organophosphorés.

      Les insecticides organochlorés agissent surtout par "contact" et modifient le potentiel électrique des fibres ner­veuses des insectes.

      Les organophosphorés et les carbamates agiraient plutôt sur la transmission de l'influx nerveux.

      Les pyréthroïdes de synthèse remplacent depuis peu les organochlorés trop toxiques. Ces produits présenteraient des propriétés cancérigènes et allergènes, surtout en cas de présence sur des denrées alimentaires.

     Quelques insecticides parmi les plus connus:

ORGANO-

CHLORES

ORGANOPHOSPHORES

CARBAMATES 

PYRETHROIDES

DDT

PARATHION

ALDICARBE

DELTAMETHRINE

LINDANE

MALATHION

CARBOFURAN

PERMETHRINE

CHLORDANE

 

OXAMYL

CYPERMETHRINE

DIELDRINE

 

CARBARYL

 

ALDRINE

 

METHIOCARBE

 

HEPTACHLORE

     

Remarques:      1. Le DDT est le plus connu des insectici­des, il fut employé pour la première fois à la fin de la deuxième guerre mondiale. Il est interdit d'utilisation en Belgique depuis 1974 mais se retrouve encore actuellement dans l'eau, les sols et l'atmosphère ainsi que dans les pro­duits alimentaires importés de pays utilisant encore ce pesticide. Il reste toxique dans le sol et l'eau pendant une trentaine d'années.

  1. L'isocyanate de méthyl, produit de base du carbaryl est à l'origine de la tragédie de Bhopal en Inde (4.000 morts).
  1. Chaque année, des centaines de millions d'abeilles et d'insectes utiles sont tués de par le monde par aspersion de pesticides. Or ces insectes nous apportent directement ou indi­rectement le tiers de notre alimentation. En effet, la majorité des arbres fruitiers ne peuvent fructifier que si les abeilles les pollinisent et il en va de même, dans une large mesure, pour les plantes fourragères servant de nourriture au bétail.

 

  1.        Toxicité des pesticides           

     Le degré de toxicité de ces produits est étudié sur des rats et animaux de laboratoire au moyen de la DL 50 (dose létale 50). La DL 50 est une caractéristique de la toxicité aiguë; c'est la quantité de pesticide ingérée nécessaire pour provoquer la mort de 50% des rats participant à une expérience en laboratoire. Cette dose létale 50 est exprimée en p.p.m. (partie par million, mg par kg).

     On distingue différents degrés de toxicité:

    - toxicité aiguë: mort de l'animal;

     - toxicité subaiguë: troubles du métabolisme, du comporte­ment, de la fécondité;

     - toxicité chronique (ou indirecte): résulte de l'absorption répétée de petites doses de produits.

     La dose létale 50 ne permet pas de mesurer le danger réel que présentent les pesticides: 

     - les expériences sont faites sur des animaux de labora­toire, loin des conditions réelles auquelles l'homme peut être soumis;

      - la toxicité peut se manifester à long terme;

      - il faut distinguer la toxicité des pesticides pour une dose absorbée en une fois et celle qui résulte d'absorp­tions répétées.

      Suite aux nombreuses constatations faites sur le terrain après les épandages insouciants de pesticides toxiques effec­tués ces 20 dernières années, les scientifiques ont mis en évidence trois types d'effets de ces produits sur la faune et l'homme, à savoir:

      - des effets cancérigènes: provoquant des tumeurs;

     - des effets mutagènes: entraînant des modifications du matériel génétique de la cellule;

     - des effets tératogènes: entraînant des malformations de l'embryon.

  1. Rémanence et bioaccumulation des pesticides

     4.1.Rémanence

     La rémanence est la persistance des pesticides dans le milieu. Les pesticides se dispersent dans l'air, l'eau et les sols où ils persistent plus ou moins longtemps selon la nature du produit et les conditions du milieu.

     Immobilisés en tout ou en partie dans les différentes cou­ches du sol, les pesticides sont soumis à des processus de dégradation (voie physico-chimique) et de métabolisation (voie biologique). Ces processus conduisent à la transformation des molécules initiales en une ou plusieurs espèces chimiques nou­velles.

     Tout surdosage doit être évité car il conduit à une aug­mentation de la rémanence.

     La rémanence d'un produit est également influencée par les conditions environnementales (t°, humidité, pH du milieu), par l'activité de la biomasse microbienne et la présence d'autres pesticides ou substances chimiques dans le sol.

REMANENCE DANS LES SOLS DE QUELQUES PESTICIDES

(exprimée en temps nécessaire à une disparition de 70-95%)

DDT

4-30 ans

Lindane

3-10 ans

Endosulfan

2 mois/2ans(50%)

Carbofuran

6 mois

Parathion

3-6 mois

2,4,5 - T (herbicide)

3-5 mois

2,4 - D (herbicide)

4-6 mois

             

     4.2. Bioaccumulation

    

     Les pesticides s'accumulent au fil de la chaîne trophique pour se concentrer dans les derniers maillons de cette chaîne: les prédateurs, dont l'homme. La bioaccumulation peut être éva­luée par un coefficient obtenu en divisant la [c] de pesticide dans l'organisme par la [c] de ce produit dans le milieu envi­ronnant:

    

Un exemple de bioaccumulation dans toute une chaîne alimentaire est fourni par le relevé des [c] de DDT dans un estuaire côtier:

Chaîne alimentaire

Quantités de DDT

(ppm)

Coefficients de

 bioaccumulation

eau

       0,00005

              1

plancton

       0,04

            800

crevettes

       0,16

          3.200

insectes volants

       0,3

          6.000

anguille

       0,28

          5.600

sterne naine

       4,75

         95.000

balbuzard

      13,8

        280.000

cormoran

      26,4

    env.520.000   

     Dans l'écosystème terrestre, c'est principalement l'inges­tion de nourriture contaminée qui détermine le degré d'intoxi­cation des animaux. Par ingestion d'animaux contaminés, les carnivores et les piscivores situés en bout de chaîne concen­trent des doses de pesticides pouvant atteindre 1000 fois celles des premiers maillons.

     4.3. La résistance

 

     Depuis une vingtaine d'années, les scientifiques ont remarqué une adaptation progressive des parasites aux pulvéri­sations de pesticides. En effet, de générations en générations, les insectes développent une résistance croissante aux produits, ce qui aboutit à un surdosage de pesticides de la part des utilisateurs.

     Ainsi, le nombre d'insectes d'importance médicale et agriculturale devenus résistants aurait doublé en dix ans (de 182 en 1965 à 364 en 1977).

 

     5.Solutions alternatives à l'emploi de pesticides

 

     Il y a une chose que tout agriculteur peut faire sans craindre une diminution du rendement: abandonner les traite­ments programmés, ces pulvérisations intempestives de pestici­des sans tenir compte de la présence ou non de ravageurs. Pour ce faire, il peut avoir recours à:

  1. a) la lutte biologique.

 

     La lutte biologique consiste en la destruction des rava­geurs par implantation de leurs ennemis naturels: virus, bacté­ries (Bacillus thuringiensis), champignons et insectes préda­teurs (coccinelles, perce-oreilles...).

     Par exemple, l'Encarsia formosa permet de combattre la mouche blanche des serres (Trialeurodes vaporarium). Les chry­salides de l'Encarsia se transforment en guêpes adultes (0,6mm) en 25 jours et parasitent les larves de la mouche blanche en y pondant leurs propres oeufs.

     Certaines recherches organisées dans le domaine de la bio­logie cellulaire et du génie génétique permettent de modifier en laboratoire le patrimoine génétique d'une plante en lui ajoutant des gènes de résistance plus performants. On peut envisager qu'il existera dans quelques années un large éventail de plantes cultivables quasiment insensibles aux ravageurs et autres maladies.

     De nombreux produits et préparations biologiques ont  été  mis au point afin de renforcer la résistance naturelle des plantes (purins de plantes, poudres d'algues, cendre de bois et extraits de plantes).

  1. b) l'agriculture biologique

 

     C'est un mode d'agriculture qui ne traite plus la terre comme un matière première inépuisable. Il y a peu d'érosion sur ce type d'exploitation car le cultivateur "biologique" opère en autosubsistance, se servant des ressources naturelles du sol et recyclant tous ses éléments nutritifs.

  1. Pesticides et alimentation

 

     Les tomates, salades et autres fruits et légumes produits en plein hiver, indépendamment des cycles naturels sont très sensibles: pour les faire pousser, on utilise une quantité impressionnante de pesticides (ces légumes poussent notamment sur des sols stérilisés au bromure de méthyl - la législation limite l'usage des bromures, mais ils se retrouvent assez régu­lièrement [1 tomate sur 3 ou 5] dans les légumes, au-delà des normes permises).

     L'importance des résidus dans l'aliment dépend de la nature des pesticides utilisés, et des modalités d'application, des délais entre application, récolte et utilisation, et des habitudes culinaires. Bon nombre de résidus restent présents même après lavage, épluchage et cuisson.

 

     Les organochlorés ne sont normalement plus utilisés en Belgique. La contamination des légumes semble due à la très grande persistance de ces substances dans l'environnement, et aux emplois illégaux (lindane sur fraises, endosulfan sur sala­des...). On les retrouve aussi dans les beurres, fromages, huiles, ou encore dans les oeufs...